La Banque centrale de Russie souhaite mettre fin aux transactions et au minage de cryptomonnaies sur le territoire russe.
Décidemment, le ciel s’assombrit encore un peu plus au-dessus de l'univers crypto. Après que la Banque centrale de Chine a interdit les transactions et le minage de cryptomonnaies sur son territoire, c’est au tour de son homologue russe de se pencher sur la question.
Une menace à la stabilité monétaire
Dans un rapport présenté lundi 21 février, la Banque centrale russe a suggéré d’interdire les investissements, paiements et l'extraction de cryptomonnaies. Les raisons invoquées sont sensiblement les mêmes qu'en Chine. L'institution financière craint d'abord que la forte volatilité des cryptomonnaies crée un risque pour les particuliers de perdre leur épargne, ou pire de devenir débiteur.
C'est aussi pour la souveraineté monétaire de la Russie que la Banque centrale s'inquiète : "tout comme la dollarisation, la cryptoisation limite la souveraineté de la politique monétaire, ce qui pourrait forcer les banques à maintenir en permanence un taux directeur plus élevé afin de contenir l'inflation." En conséquence de quoi l'accès au crédit par les ménages et les entreprises s'en trouverait limité. La Banque centrale craint aussi une fuite de l'épargne, rappellant que le volume de transactions réalisées chaque année par des citoyens russes culmine à 5 milliards d'euros par an. Par rebond, c'est la capacité financière du pays qui s'en trouverait affectée, "réduisant le nombre d’emplois et le potentiel d’augmentation des revenus des ménages".
Le pays est actuellement le troisième plus important pôle de minage derrière les États-Unis et le Kazakhstan et les fermes y poussent comme des champignons depuis leur interdiction en Chine. Bien sûr, les fermes de minages n'échapperont pas non plus au coup de filet. La banque se risquant même à invoquer des considérations environnementales pour justifier l'interdiction. "Le minage crée une consommation improductive d'énergie électrique, qui menace l’alimentation électrique des bâtiments résidentiels, des infrastructures sociales et des entreprises et la mise en œuvre du programme environnemental de la Russie".
Coup dur pour la Blockchain
Bien sûr, c'est aussi l'épouvantail des activités illégales qui fait se hérisser les poils de la Banque centrale. "En raison de l'anonymat des transactions, les substituts monétaires sont largement utilisés pour des activités illégales", justifie le rapport. Reste à déterminer de quelles "activités illégales" il est question. D'après certaines sources anonymes de Bloomberg, le FSB lui-même aurait fait pression sur le gouverneur de la Banque centrale afin qu'il sanctionne les cryptomonnaies. La raison ? Des dons en cryptomonnaies versés à des organisations jugées indésirables et classées "agents de l’étranger", par le ministère de la Justice.
Problème, le projet de la Banque centrale, si un jour votée à la Douma, n'impactera pas que ces organisations. « L'interdiction des crypto-monnaies proposée par la Banque centrale de Russie entraînera une fuite des informaticiens du pays et détruira un certain nombre de secteurs de l'économie des hautes-technologies. », s’est inquiété Pavel Durov, co-fondateur de l’application de messagerie cryptée Telegram. Ajoutant qu’une telle interdiction ralentira inévitablement le développement des technologies blockchains, il plaide plutôt pour une réglementation progressiste à l’égard des cryptomonnaies. « La Russie est aujourd'hui l'un des leaders en termes de nombre de spécialistes hautement qualifiés dans l'industrie de la blockchain. Une réglementation réfléchie permettra au pays d'équilibrer la répartition des forces dans le système financier international et de devenir l'un des acteurs majeurs de la nouvelle économie » a-t-il ajouté.
Leonid Volkov, bras droit d'Aleksei Navalny principal opposant à Vladimir Poutine, tempère les inquiétudes de Pavel Durov. "Techniquement, interdire la crypto-monnaie, c’est comme interdire les transferts de personne à personne (c’est-à-dire que c’est impossible)… Oui, ils peuvent rendre très difficile le dépôt de fonds sur les échanges cryptographiques, ce qui signifie que des services intermédiaires apparaîtront et agiront via des juridictions étrangères. Oui, les coûts de transaction vont augmenter." Mais c'est à peu près tout selon l'activiste.