Câest une victoire majeure pour Google aprĂšs onze ans de procĂ©dures devant les tribunaux. La Cour suprĂȘme des Ătats-Unis a donnĂ© raison Ă Mountain View contre Oracle, qui lâaccusait de violation de copyright relatif Ă Java et Ă Android.
Depuis onze ans Google et Oracle sont Ă couteaux tirĂ©s. Le second reproche au premier dâavoir copiĂ© une partie du code de Java pour dĂ©velopper Android. AprĂšs plusieurs passes dâarmes face aux tribunaux, en premiĂšre instance et en appel, oĂč tour Ă tour Google puis Oracle lâemportaient et les juges sâopposaient sur la notion de propriĂ©tĂ© intellectuelle et si oui ou non le code de Java Ă©tait couvert par copyright, ou si sa rĂ©utilisation dĂ©pendait dâun usage raisonnable (fair use de la part de Google).
En 2012, la justice avait donnĂ© raison Ă Mountain View, estimant que les API nâĂ©taient pas couvertes par le droit dâauteur. Deux ans plus tard, en appel, cette dĂ©cision Ă©tait renversĂ©e et Oracle dĂ©clarait victoire. La Cour suprĂȘme, invoquĂ©e dans lâaffaire, refusait de se prononcer. Les deux opposants retournaient Ă la case dĂ©part : le tribunal du district nord de Californie estime que lâutilisation des API Java par Android relevait du « fair use » en 2016 puis en 2018 la cour dâappel affirmait le contraire, soulignant entre autres que Google avait copiĂ© bien plus de lignes de code que nĂ©cessaire et quâil y avait un intĂ©rĂȘt commercial du gĂ©ant.
Google libérateur
Google avait de nouveau portĂ© lâaffaire devant la Cour suprĂȘme, qui vient finalement de se prononcer sur lâaffaire. Et ce en faveur de Mountain View, les juges de la plus haute instance amĂ©ricaine estimant Ă six voix contre deux que la rĂ©utilisation du code de Java relevait bien du âfair useâ. La Cour reconnaĂźt dâune part que âle fait que les programmes informatiques soient principalement fonctionnels rend difficile lâapplication des concepts traditionnels du droit dâauteur dans ce monde technologiqueâ. Ce qui annonce dâemblĂ©e la couleur : son verdict dans cette affaire prĂ©cise ne saurait prĂ©sumer de ses futures dĂ©cisions dans des affaires similaires.
Certes, Google a copiĂ© 11 500 lignes de code de Java mais la Cour suprĂȘme ne souscrit pas au verdict de la cour dâappel selon laquelle Mountain View aurait pu se contenter de 170 lignes pour permettre la compatibilitĂ© entre Android et Java. âCette conclusion considĂšre les objectifs lĂ©gitimes de Google de maniĂšre trop Ă©troiteâ Ă©crivent les juges. Car Google nâentendait pas seulement fonder son seul systĂšme Android sur la base de Java, mais âde permettre aux programmeurs d'utiliser leurs connaissances et leur expĂ©rience en utilisant l'API Sun Java lorsqu'ils Ă©crivent de nouveaux programmes pour smartphones avec la plate-forme Androidâ.
Un verrou
Ainsi, aux yeux de la Cour suprĂȘme, Ă©crire son propre code nâaurait pas permis Ă Google dâatteindre cet objectif : en reprenant plus largement le code de Sun Microsystems, Mountain View a âles Ă©nergies crĂ©atives des programmeurs. Et il avait besoin de ces Ă©nergies pour crĂ©er et amĂ©liorer ses propres systĂšmes Android innovants. Nous pensons par consĂ©quent que ce facteur de «substantialité» pĂšse en faveur du fair useâ.
Dâautant que la Cour suprĂȘme considĂ©re que forcer au respect dâun droit dâauteur quant Ă Java se serait avĂ©rĂ© nuisible pour le public. âCompte tenu des coĂ»ts et des difficultĂ©s liĂ©s Ă la production dâAPI alternatives avec un attrait similaire pour les programmeurs, copyrighter lâapplication ici ferait du code de dĂ©claration de lâAPI Sun Java un verrou limitant la crĂ©ativitĂ© future des nouveaux programmesâ.
Android n'a pas nui Ă Sun Microsystems
Car Oracle seul en aurait âdĂ©tenu la clĂ©â. Ce qui aurait Ă©tĂ© particuliĂšrement rentable pour lâentreprise de Larry Ellison, mais bien moins pour les programmeurs et pour lâĂ©cosystĂšme tout entier. Dâautant que Sun Microsystems, avant son rachat par Oracle, et le mobile, ce nâĂ©tait pas tout Ă fait une grande histoire dâamour.
La Cour observe en effet que lâĂ©diteur ân'aurait pas Ă©tĂ© en mesure de pĂ©nĂ©trer ces marchĂ©s avec succĂšs, que Google ait copiĂ© ou non une partie de son APIâ du fait de son positionnement et surtout de ses âefforts infructueux pour pĂ©nĂ©trer le marchĂ© mobileâ. En rĂ©sumĂ©, Android nâa en rien empĂȘchĂ© Sun, puis Oracle, de sâinviter sur le marchĂ© naissant des smartphones et ainsi Google n'a pas enfreint la loi en copiant le code de Java.